L'entreprise Info 3000 donne un coup de jeune aux veilles cabines téléphoniques qui se mouraient dans l'urbanité du XXI siècle. Bientôt elles auront un emballage high-tech sous forme cylindrique des plus affriolantes. Info Flash Live a rencontré, Phonie Song, qui tente sa chance sur le pavé parisien.

- Phonie Song pouvez-vous nous dire un mot sur vos origines ?

- Phoning Song : Cela remonte en 1876, ça ne date pas d'hier. Mes ancêtres étaient choyés dans des maisons bourgeoises. L'age d'or diront certaines. Elles ne manquaient pas de classe dans les années 1900. Les Marty, les PTT24 avaient de l'allure. Notre clientèle avait les mains manucurées. Ils nous excitaient en faisant plusieurs tours de manivelle. On était les fées du logis.

- Pourtant, cela n'a pas duré, Phonie Song ?

- Non ! Le téléphone s'est démocratisé. Alors ma grand-mère a fait le tapin à l'extérieur des endroits chic. C'est pas le client qui manquait. A la queue leu leu. On avait des éjaculateurs précoces qui au bout d'une minute avait leur dose. Mais la tendance c'était d'être long dans le crachoir. Tant que le gusse mettait les pièces dans la fente, on ne s'en plaignait pas.

- Est-il vrai que les touches ont changé vos rapports ?

- Evidemment ! Le cadran avait un côté trop mécanique. Alors que les touches sont plus sensuelles. C'est du moins l'impression que cela m'a fait au départ. Mais, plusieurs de mes copines se sont fait taper dessus soi disant qu'on ne leur redonnait pas la monnaie de leur pièce.

- Vous vous plaigniez des cadences infernales ?

- Oui ! Quand France Télécom a décrété que c'était moins cher après 20h. La ruée a été trébuchante et sonnante. Les actes de vandalismes ont augmenté. Nombreuses de mes copines, ont perdu la voix car on leur a arraché le combiné téléphonique. Les viols étaient devenus un sport car des clients se tiraient sans payer.

- France Télécom a pourtant trouvé la combine pour arrêter ce massacre.

- La carte à puce a été pour nous d'un grand secours. Les agressions sur les cabines téléphoniques ont considérablement diminué comme le temps parole à la minute. Les prix ont grimpés.

- On dit que dans votre métier vous n'avez pas l'orgasme facile.

- Vous plaisantez ! La carte à puce offre une ouverture plus large et durable. Alors qu'avant, le client était poussif, il s'arrêtait de geindre dès que le voyant clignotait. Maintenant 40, 120 unités ça laisse rêveuse.

- Les filles du nord vous on porté un coup au moral avec leur démarche ondulante.

- M'en parlez pas ! La nouvelle génération est insupportable. Nous autres, les cabines téléphoniques on savait rester à nos places. On frimait pas en se baladant pour murmurer des banalités au creux de l'oreille. Question intimité, c'est à revoir. Tout le monde entend ces ébats téléphoniques dans le bus, le métro, la rue. Les Ericsson, les Nokia me tapent sur le système. Je veux bien croire qu'il y ait moins de boulot pour tout le monde, mais de là à être mobile. C'est la précarité assurée !

- Les plus anciennes cabines téléphoniques ont cru faire une retraite dorée dans le milieu rural. Votre mère a-t-elle été attirée par cette aventure ?

- Une aventure sans lendemain vous voulez dire. France Télécom supprime les cabines téléphoniques dans les endroits les plus retirés. Les garces de mobiles nous ont fait beaucoup de tort. O.K. ! C'est vrai qu'un bouseux grabataire qui se traîne jusqu'à nous c'est pas très excitant. Ils ont droit aussi à leur cabine chérie.

- Les cabines téléphoniques étaient vouées à la casse. Heureusement, Internet vous sauve la mise. Heureuse ?

- Je débute dans le métier. L'idée qu'un écran tactile permet à l'utilisateur d'avoir des informations gratuites tout en surfant sur le web n'est pas désagréable. Notre métier sera sécurisé par des cartes téléphoniques prépayées. Huit à 16 F de l'heure selon la tranche horaire cela paraît correct. Seulement mon relookage futuriste m'agace.

- Que lui reprochez-vous Phonie Song ?

- Le manque de chaleur humaine car le client n'est pas protégé des intempéries. Ma mère me raconte souvent qu'à l'intérieur de sa cabine téléphonique elle en a consolé, enlacé, des clients.

Phil Marso - 17/01/2000

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